- Florent Mazzoleni
Djibathen Sambou par Florent Mazzoleni.
Dernière mise à jour : 7 janv. 2022

Peintre majeur du Sénégal contemporain, Sambou Diabathen est trop longtemps resté dans l’ombre de créations pourtant lumineuses. Originaire de Casamance, il étudie aux Beaux-Arts de Dakar avant de croiser la route du jeune producteur sénégalais Ibrahima Sylla à la fin des années 1970. Celui-ci lui confie l’illustration de plusieurs de ses productions comme celles du Gestü de Dakar, du Guelewar, d’Ouza et ses Ouzettes ou bien encore du légendaire Orchestra Baobab.
Dans son travail pictural, le lien unissant musique et peinture est instantané, à l’image de la pochette sidérante d’afro-psychédélisme de Gouyegui de Dakar en 1982. Chef d’œuvre du Baobab, cet album est l’un des classiques des musiques africaines modernes, autant par sa pochette habitée que la musique jouée par l’orchestre et chantée par Thione Seck, Balla Sidibé et Medoune Diallo. Souvent lacrymal, leur lyrisme rejoint les larmes de visage iridescent dessiné par Diibathen.
Véritable manifeste esthétique, la pochette de Gouye-Gui (« baobab » en wolof, le groupe étant alors sous contrat sous le nom de Baobab), cette peinture allie spiritualisme mouride, soleil couchant et baobab conquérant dans un regard de jade, nimbé d’azurs atlantiques. Diibathen s’affranchit ici des contraintes esthétiques de sa génération et rayonne en une création irradiant de vibrations afro-futuristes. Il est ici à l’avant-garde de la création sénégalaise contemporaine. Sa série suivante de créations pour le label d’Ibrahima Sylla imprime durablement son œuvre de cet afro-psychédélisme combattant.
Durant des décennies, Diibathen poursuit son parcours au gré de peintures d’une précision euclidienne, qui tranchent avec la figuration libre et l’ascétisme d’une partie des productions locales. Malgré quelques expositions à travers le monde, ce n’est qu’à la faveur de la redécouverte du patrimoine discographique sénégalais que cette partie méconnue de son travail est redécouverte.
Près de quatre décennies plus tard, cette série de cinq peintures légendaires revisite une œuvre unique en son genre, à la croisée d’univers pluriels, mêlant passé, présent et futur à la pointe d’un continent sublimé dont Sambou Djibathen est l’un de ses représentants trop longtemps oublié.